¨Le Baptême de Jésus-Christ
Paul Pierre- Messages : 66
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¨Le Baptême de Jésus-Christ
Paul Pierre- Messages : 66
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Re: ¨Le Baptême de Jésus-Christ
(Matth., in; Marc, î; Luc, m).
Vox Domini super atmas, Deus majestatis in-tonuit ;
Dominus super aquas militas ; vox Do-mini in virtute,
vox Domini in magnificentia (PS. XVI
Ce grand mystère eut lieu l'an quinzième de l'empire de Tibère Auguste, Jésus-Christ ayant accompli seulement de treize jours Tannée trentième de son âge, le 6 janvier ou vendredi, le même jour où, trente ans auparavant, il avait été adoré des rois mages, selon l'ancienne et universelle tradition de l'Église. Le lieu fut cette partie du fleuve du Jourdain qui traverse la Judée entre Sartane et Jéricho, où tant d'années auparavant les Israélites, sous la conduite d'un autre Jésus ou de Josué, passèrent ce même fleuve à pied sec et s'avancèrent à la conquête de la terre promise.
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]es sublimes et poétiques expressions par lesquelles le prophète royal annonce les merveilles et les prodiges que la voix du Seigneur devait opérer sur les eaux au temps de la Rédemption, ne se sont littéralement accomplies, dit saint Pierre Ghrysologue, que dans le mystère du baptême reçu sur les bords du Jourdain par Jésus-Christ des mains de son précurseur. Ce fut alors que le Seigneur donna aux eaux, par sa présence, une vertu divine, et qu'il institua le premier des sacrements . C'est en ce jour que le Père céleste donna le magnifique spectacle des cieux entr'ouverts et tout resplendissants de lumière, et qu'on vit l'Esprit-Saint venir en forme de colombe se reposer sur la tête adorable de Jésus-Christ. C'est en ce moment que l'Éternel proclama, d'une manière majestueuse, l'humble Fils de l'homme vrai Fils de Dieu, et Sauveur du monde :
« C'est ici mon Fils bien-airaé, objet de mes délices éternelles et de mes plus tendres complaisances »
Voilà donc la voix dont David a parlé ; voix qui s'est fait entendre sur les eaux, non d'un seul fleuve, mais de tout l'univers; voix de vertu, de majesté et de gloire , qui, s'étant fait entendre majestueuse-ment sur les bords du Jourdain, retentira jusqu'à la fin des siècles dans le monde entier.
Saint Ambroise appelle ce mystère grand et ineffable, en même temps qu'il est plein de douceurs et propre à réjouir le cœur; car le même jour où sa Mère terrestre, en pressant amoureusement Jésus enfant sur sou chaste sein, le proclamait vrai homme, le Père éternel, trente-trois ans plus tard, en lui rendant témoignage du ciel, le déclarait aussi vrai Dieu. Le même jour où Marie l'offrait à l'adoration des mages, le Père éternel le présenta à l'adoration et au culte de l'univers .
Élevons donc aujourd'hui, mes frères, nos pensées et nos cœurs à la contemplation de ce grand mystère de notre foi. Considérons les grands miracles qui s'opèrent dans Tordre de la nature et dans Tordre de la grâce. Voyons le personnage que Jésus-Christ y représente, la gloire avec laquelle il s'y manifeste, les vérités qu'il nous y révèle, le sacrement qu'il y institue, la figure qu'il y remplit et les enseignements qu'il nous y donne. Contemplons en particulier, dans le mystère du baptême du Sauveur, l'origine, l'institution et l'esprit de notre baptême, afin que nous apprenions à respecter en nous-mêmes ce grand sacrement, c'est-à-dire le premier des bienfaits de Dieu et le plus solennel de nos engagements, et que nous correspondions aux prodiges de sa bonté divine par les transports du plus tendre amour.
C'est l'opinion la mieux fondée et la plus communément suivie.
1 L'Église, au jour du baptême de Jésus-Christ, dit : « Aujourd'hui « Jésus-Christ a lavé dans le Jourdain nos péchés. » Or, comment a-t-il pu laver nos péchés, sinon en insinuant en ce jour le baptême qui efface tous ces péchés?
2 Presque tous les Pères, et particulièrement saint Grégoire de Nazianze, saint Chrysostôme, saint Ambroise, saint Jérôme, saint Augustin, saint Maxime, saint Pierre Chrysologue, le Vénérable Bede sont de ce sentiment.
3 Dans saint Jean, qui sera cité en son lieu, il est dit qu'en même temps qu'il commença a prêcher, il commença a baptiser, et que les apôtres firent de même. Le baptême avait donc déjà été institué depuis que le divin Maître avait commencé à prêcher; il fut seulement expliqué, publié et conféré pendant la prédication. Or, quand et ou peut-on mieux croire que cette grande institution eut lieu, sinon dans le Jourdain, quand le même Jésus-Christ y fut baptisé? Cette parole du Sauveur à Nicodème : « Quiconque ne renaît pas de l'Esprit-« Saint et de l'eau; et aux apôtres : Baptisez au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit tous ceux qui croient, indique clairement que le baptême était une chose déjà connue, un sacrement déjà institué. Donc l'institution du baptême fut faite dans le Jourdain; mais le précepte obligatoire fut porté après la Pentecôte, quand fut publiée la nouvelle loi évangélique et abolie l'ancienne. Le premier qui publia ce précepte du premier des sacrements fut saint Pierre, le chef des apôtres, au jour même de la Pentecôte . Toute cette doctrine est des plus illustres théologiens, ayant à leur tête saint Thomas, ce grand génie, dont voici les belles paroles : • Les « sacrements n'ont été institués que pour conférer la grâce; d'où l'on
• voit qu'un sacrement a été institué alors qu'il a reçu la vertu de produire son effet. Or, le baptême a reçu une telle vertu précisément
• quand Jésus-Christ a été baptisé, d'où l'on doit dire qu'il fut alors
• institué en tant que sacrement. Mais la nécessité de le recevoir fut « instituée après la passion et la résurrection dn Sauveur, et cela pour
• deux raisons :
1° Parce que les sacrements de l'ancienne loi, qui étaient figuratifs, et auxquels le baptême et les autres sacrements de la loi « nouvelle ont succédé, ne furent abolis qu'à la passion du Sauveur.
2° Parce que l'homme, par le baptême, retrace en lui la passion et la mort de Jésus-Christ. C'est pourquoi le Sauveur a dû souffrir et ressusciter avant qu'il fût ordonné aux hommes de retracer sur eux sa mort et sa résurrection. » Il ne suit pas de là que le baptême institué et administré par les apôtres avant la passion du Sauveur, ait été une cérémonie vaine et stérile « Non, continue l'Ange de l'école :
« c'était un vrai baptême qui, par anticipation, prenait son efficacité de « la passion future de Jésus-Christ, autant qu'il en était la figure, bien différente des sacrements de l'ancienne loi; car ceux-ci étaient de simples figures et rien de plus, tandis que le baptême institué par le Sauveur recevait de son auteur divin la vertu de justifier, et sa passion « devient par sa vertu une source de salut .
Paul Pierre- Messages : 66
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Re: ¨Le Baptême de Jésus-Christ
PREMIÈRE PARTIE
.Le baptême ou l'ablution que saint Jean administrait aux peuples sur les bords du Jourdain n'était point un sacrement, c'était, comme l'enseignent les Pères et les interprètes, un signe, une confession publique faite par ceux qui recevaient ce baptême ; c'est pourquoi il est dit qu'ils confessaient leurs péchés : Confitentes peccata sua (Marc, i, 5). C'était une protestation de vouloir se corriger, une promesse de faire pénitence, une prière solennelle adressée à Dieu, afin que, par sa miséricorde, il purifiât les âmes du péché, comme l'eau du Jourdain purifiait extérieurement les corps. Enfin c'était un signe visible de la contrition du cœur qui, lorsqu'elle était par-faite, effaçait les péchés
Or, s'il en est ainsi, pourquoi Jésus-Christ vient-il sur les rivages du Jourdain pour y être baptisé par saint Jean ?
Qu'avait-il besoin, dit saint Ambroise, de se soumettre à cette cérémonie des pécheurs, lui qui n'a pas même l'ombre du péché ?
Retirez-vous donc, Seigneur ; il ne convient point que le maître descende parmi les serviteurs, ni que la sainteté soit confondue avec le péché, la race de vipères avec le fruit de la bienheureuse vierge Marie, le Fils unique de Dieu, sans tache et sans souillure, avec les cou-pables et immondes enfants des hommes. Non, cette ablution n'est point pour vous, Seigneur, car elle vous rendrait moins digne aux yeux des hommes terrestres, sans rien ajouter à votre gloire devant votre Père céleste.
Mais non, s'écrie le même saint Ambroise : écoutez, ô chrétiens, le grand mystère : Jésus-Christ se présente au baptême de Jean, non pas pour être sanctifié dans les eaux, mais pour les sanctifier et pour purifier, par son ablution, le fleuve dans lequel il se baigne. En effet, étant saint, pur et innocent, ou l'innocence, la pureté et la sainteté même, non-seule-ment en ce qu'il était Fils de Dieu, mais aussi Fils de l'homme, puisqu'il en avait pris la nature sans en contracter le péché, cette ablution de pénitence ne lui était nullement nécessaire. Aussi ne la fit-il point pour lui, mais pour nous, pécheurs, afin de purifier notre chair dans sa chair virginale, qu'il avait prise de notre condition . Saint Augustin s'écrie à son tour : ô chrétiens, reconnaissez que celui qui est mort pour notre amour a aussi été baptisé pour nous .
Seigneur, restez donc parmi cette foule de pécheurs comme l'un d'eux ou comme le dernier de tous. Daignez recevoir ce baptême des mains de Jean-Baptiste ; car autant cette cérémonie est humiliante pour vous, autant elle est précieuse pour nous; et si vous ne consentez à laver votre corps virginal dans ces eaux, nos âmes impures ne pourront être purifiées par la grâce.
Si cependant nous voulons, mes frères, mieux comprendre ce mystère et mieux connaître le personnage que Jésus-Christ y représente, rappelons-nous que, selon la doctrine de saint Paul, le Fils de Dieu, en se faisant homme, s'est revêtu du vieil homme tout entier, auquel nous appartenons tous; il s'est revêtu de toute l'humanité, laquelle a été pour cela entièrement crucifiée avec Jésus-Christ : Nos scimus quia vêtus homo noster erucifiams est.
Puisque notre divin Sauveur avait pris entièrement notre chair et qu'il s'était mis à notre place, il était donc bien juste, conclut le docteur saint Maxime, qu'il entrât dans toutes les conditions de l'homme, passant par tous ses états, supportant toutes ses misères et subissant toutes ses humiliations Or, l'humanité était coupable ; elle ne pouvait se présenter à Dieu que comme pénitente et criminelle. C'est pourquoi Jésus-Christ ayant assumé cette humanité coupable et s'étant revêtu d'une chair semblable, quant à la condition extérieure, à celle des pécheurs , il dut aussi se présenter à son Père en qualité de criminel et de pénitent. Et c'est tout juste ce qu'il fait en ce jour, se soumettant avec la plus grande humilité au baptême de la pénitence.
Cela veut dire que, par ce baptême, le Fils de Dieu, la sainteté par essence, s'avoue publiquement, se confesse et s'accuse, en quelque sorte, comme pécheur ou comme l'homme du péché . Et en même temps il contracte solennellement l'obligation de faire pénitence du péché, de l'expier par sa passion et par la mort de la croix. En consentant à ce que Jean étende ses mains innocentes sur lui pour répandre l'eau sur son corps adorable, il consent dès lors à ce que les Juifs et les soldats portent leurs mains sacrilèges sur sa personne divine pour le crucifier et le déchirer avec les clous, les fouets, les épines et la lance. En permettant qu'il fût lavé dans les eaux du Jourdain, il donna son consentement pour être arrosé un jour de son propre sang.
Par ce baptême d'eau qu'il reçoit aujourd'hui, il s'engage à recevoir aussi ce baptême de sang dans lequel tous nos péchés devaient être effacés et dont lui-même a parlé, en disant : « Je désire être baptisé du baptême, et combien suis-je pressé qu'il soit accompli ! » Ainsi dès ce moment, dit Cornélius, il gémit dans l'amertume de son cœur par une contrition parfaite et une douleur infinie sur tous nos péchés; il les déteste, les pleure et les abhorre; il demande d'en être lavé et purifié, comme s'il eût été, en effet, personnellement coupable, tandis que c'était sa charité seule qui les lui faisait expier .
Dans cette circonstance solennelle il gémit donc sur nos péchés par une contrition sincère et parfaite que nous devrions en avoir, mais que nous n'aurions jamais eue; il demande que nous tous, qui étions représentés en lui, nous fussions purifiés de toutes nos fautes, et il voulut, en conséquence, supporter devant le ciel et la terre l'humiliation et la honte de paraître pécheur et comme le péché même, en nous trans-mettant le mérite infini de cette confession, de cette douleur et de cette pénitence, si bien qu'il nous acquit l'ornement divin de sa justice, de sa sainteté et de son infinie perfection .
Paul Pierre- Messages : 66
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- Message n°4
Re: ¨Le Baptême de Jésus-Christ
C'est pourquoi, par cette ablution de son corps très pur dans le Jourdain, Jésus-Christ a, comme le chante l'Église, purifié nos âmes de leurs souillures : Hodie in Jordane Christus lavit nostra crimina.
Saint Àmbroise dit aussi que le Sauveur, en descendant dans les eaux, submergea et effaça dès ce moment toutes les fautes de ceux qui auraient cru en lui. Et pourquoi n aurait-il pas détruit les péchés de tous, puisqu'il s'était chargé de tous?
Alors s'accomplit cette grande parole de saint Jean, que l'Évangile rapporte :
« Voici l'Agneau de Dieu, qui efface les péchés du monde. »
Que ce mystère est grand, qu'il est admirable ! Un seul s'est plongé dans les eaux, et celui-là seul a pourvu au salut de tous ! C'est donc vainement que Jean-Baptiste, surpris, stupéfait, confus et comme hors de lui-même à la vue de cet abaissement profond par lequel le Fils de Dieu demande le baptême à cet homme pécheur, s'écrie :
« C'est moi qui dois être baptisé par vous, et vous venez à moi? Ego te haptizari debeo, et tu venis ad me? » Et Jésus lui répondit:
« Faites maintenant ce que je dis, car il convient que nous accomplissions toute justice . » Il voulait lui dire : Vous recevez, en effet, de moi le baptême de l'esprit, lequel sera pour nous le gage du baptême de sang que vous obtiendrez, comme mon précurseur, pour la sainteté de ma loi et pour la gloire de mon nom. En ce moment il faut que je reçoive de vous le baptême de pénitence, comme étant le représentant et la victime de l'humanité coupable : Sine modo. Comme mon serviteur, vous devez m'obéir jusqu'à baptiser votre Seigneur même ; et moi, comme Rédempteur, je dois m'abaisser jusqu'à cette humiliante cérémonie de recevoir le baptême de mon serviteur. Nous devons porter jusqu'à ce dernier degré, vous votre dépendance , et moi ma complaisance et ma bonté. Nous accomplirons entre nous deux la mission qui nous incombe ; nous pratiquerons toute justice et exercerons toute vertu; car la vertu parfaite consiste dans l'accomplissement de la charge que chacun a reçue de Dieu, et l'ordre et la justice naissent de l'obéissance de celui qui sert et de l'humilité de celui qui commande : Sic nos decet implere omnem jttstitiam .
Quel prodige d'abaissement et d'humiliation de la part de Jésus-Christ, mes frères! Le voilà à genoux devant Jean-Baptiste ; ainsi le Maître se trouve aux pieds du serviteur, le capitaine aux pieds du soldat, le juge aux pieds du héraut, le Créateur aux pieds de sa créature, le Fils de Dieu aux pieds du fils de l'homme; le voilà, les mains sur la poitrine, la tête inclinée, le front humilié, les yeux baissés, la confusion peinte sur la face, la prière sur les lèvres, la douleur dans le cœur; et, dans cette attitude de criminel et de pécheur, il reçoit des mains de Jean l'ablution de l'expiation et de la pénitence : Et baptizatus est a Joanne .
Mais admirez, mes frères, la merveilleuse économie des mystères de notre divin Sauveur. Tandis qu'il cherche à se cacher, il se découvre et se manifeste de toutes parts; quand il s'humilie, il apparaît de toute sa grandeur; tandis qu'il descend à la condition du dernier des enfants des hommes, une gloire toute particulière et une magnificence toute spéciale l'environne et le fait connaître pour le Fils de Dieu :
c'est ainsi qu'il s'est montré, à sa naissance et à sa mort, tout comme il apparaît encore aujourd'hui dans son baptême. Car à peine l'eau et myst-rieuse et prophétique est-elle répandue sur sou corps adorable, à peine a-t-il laissé échapper de ses lèvres et surtout de son cœur sa prière à jamais toute puissante : Jesu baptizato et orante (Luc., 21 ), que les cieux, tirant le voile qui les couvre, montrent leurs magnificences dans les régions supérieures de l'air et forment une immense ouverture toute resplendissante de lumière, laissant s'échapper un torrent de rayons sur la tête auguste du Sauveur : Et ecce apertisunt ei cœli (Matth., 16). (C'était pour indiquer que ce grand prodige, visible à tout le monde, arrivait non point en vertu du baptême de Jean, mais par les mérites de l'humilité de Jésus-Christ, par l'efficacité de sa prière et pour la gloire de sa personne divine, dont la dignité était infiniment supérieure à celle du précurseur .
Saint Maxime ajoute qu'autour de cette ouverture des cieux accoururent en foule les Vertus célestes, comme pour admirer la profonde humilité de leur Seigneur et pour adorer le Fils de Dieu, baptisé par l'homme ; car il est écrit que les anges brûlent toujours du désir de contempler la sainte face de Jésus-Christ et d'en faire leurs délices infinies .
Saint Àmbroise dit aussi que le Sauveur, en descendant dans les eaux, submergea et effaça dès ce moment toutes les fautes de ceux qui auraient cru en lui. Et pourquoi n aurait-il pas détruit les péchés de tous, puisqu'il s'était chargé de tous?
Alors s'accomplit cette grande parole de saint Jean, que l'Évangile rapporte :
« Voici l'Agneau de Dieu, qui efface les péchés du monde. »
Que ce mystère est grand, qu'il est admirable ! Un seul s'est plongé dans les eaux, et celui-là seul a pourvu au salut de tous ! C'est donc vainement que Jean-Baptiste, surpris, stupéfait, confus et comme hors de lui-même à la vue de cet abaissement profond par lequel le Fils de Dieu demande le baptême à cet homme pécheur, s'écrie :
« C'est moi qui dois être baptisé par vous, et vous venez à moi? Ego te haptizari debeo, et tu venis ad me? » Et Jésus lui répondit:
« Faites maintenant ce que je dis, car il convient que nous accomplissions toute justice . » Il voulait lui dire : Vous recevez, en effet, de moi le baptême de l'esprit, lequel sera pour nous le gage du baptême de sang que vous obtiendrez, comme mon précurseur, pour la sainteté de ma loi et pour la gloire de mon nom. En ce moment il faut que je reçoive de vous le baptême de pénitence, comme étant le représentant et la victime de l'humanité coupable : Sine modo. Comme mon serviteur, vous devez m'obéir jusqu'à baptiser votre Seigneur même ; et moi, comme Rédempteur, je dois m'abaisser jusqu'à cette humiliante cérémonie de recevoir le baptême de mon serviteur. Nous devons porter jusqu'à ce dernier degré, vous votre dépendance , et moi ma complaisance et ma bonté. Nous accomplirons entre nous deux la mission qui nous incombe ; nous pratiquerons toute justice et exercerons toute vertu; car la vertu parfaite consiste dans l'accomplissement de la charge que chacun a reçue de Dieu, et l'ordre et la justice naissent de l'obéissance de celui qui sert et de l'humilité de celui qui commande : Sic nos decet implere omnem jttstitiam .
Quel prodige d'abaissement et d'humiliation de la part de Jésus-Christ, mes frères! Le voilà à genoux devant Jean-Baptiste ; ainsi le Maître se trouve aux pieds du serviteur, le capitaine aux pieds du soldat, le juge aux pieds du héraut, le Créateur aux pieds de sa créature, le Fils de Dieu aux pieds du fils de l'homme; le voilà, les mains sur la poitrine, la tête inclinée, le front humilié, les yeux baissés, la confusion peinte sur la face, la prière sur les lèvres, la douleur dans le cœur; et, dans cette attitude de criminel et de pécheur, il reçoit des mains de Jean l'ablution de l'expiation et de la pénitence : Et baptizatus est a Joanne .
Mais admirez, mes frères, la merveilleuse économie des mystères de notre divin Sauveur. Tandis qu'il cherche à se cacher, il se découvre et se manifeste de toutes parts; quand il s'humilie, il apparaît de toute sa grandeur; tandis qu'il descend à la condition du dernier des enfants des hommes, une gloire toute particulière et une magnificence toute spéciale l'environne et le fait connaître pour le Fils de Dieu :
c'est ainsi qu'il s'est montré, à sa naissance et à sa mort, tout comme il apparaît encore aujourd'hui dans son baptême. Car à peine l'eau et myst-rieuse et prophétique est-elle répandue sur sou corps adorable, à peine a-t-il laissé échapper de ses lèvres et surtout de son cœur sa prière à jamais toute puissante : Jesu baptizato et orante (Luc., 21 ), que les cieux, tirant le voile qui les couvre, montrent leurs magnificences dans les régions supérieures de l'air et forment une immense ouverture toute resplendissante de lumière, laissant s'échapper un torrent de rayons sur la tête auguste du Sauveur : Et ecce apertisunt ei cœli (Matth., 16). (C'était pour indiquer que ce grand prodige, visible à tout le monde, arrivait non point en vertu du baptême de Jean, mais par les mérites de l'humilité de Jésus-Christ, par l'efficacité de sa prière et pour la gloire de sa personne divine, dont la dignité était infiniment supérieure à celle du précurseur .
Saint Maxime ajoute qu'autour de cette ouverture des cieux accoururent en foule les Vertus célestes, comme pour admirer la profonde humilité de leur Seigneur et pour adorer le Fils de Dieu, baptisé par l'homme ; car il est écrit que les anges brûlent toujours du désir de contempler la sainte face de Jésus-Christ et d'en faire leurs délices infinies .
Paul Pierre- Messages : 66
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- Message n°5
Re: ¨Le Baptême de Jésus-Christ
Au même temps et du milieu de cette splendeur des cieux, sans que l'on vît personne, on entendit une voix sonore, majestueuse, solennelle et divine, qui disait :
« Celui que vous voyez est mon Fils bien aimé, l'objet de mes éternelles complaisances . »
Et, s'adressant au Sauveur, il ajouta :
« Tu es mon Fils bien-aimé, j'ai mis en toi mes complaisances . »
C'était lui dire : Comme tu es la splendeur de ma gloire et l'image de ma substance, tu me plais singulièrement et en tout ; c'est toi seul que j'aime souverainement et uniquement ; en toi je me repose, je me rassasie et je me réjouis. Je mettrai mes complaisances dans les hommes et je les aimerai, mais ce n'est qu'autant qu'ils seront tes sectateurs et tes dis-ciples; et comme ils seront aimés de toi et comblés de ta grâce, ils ne formeront avec toi qu'un seul corps et ne seront qu'un seul Fils, en sorte qu'en les aimant je les aimerai en toi, et toi-même en eux.
Ce n'est pas tout : de cette même ouverture des cieux et du sein de cette gloire d'où se faisait entendre la voix mystérieuse, l'on vit l'Esprit-Saint descendre sur Jésus-Christ en forme corporelle de blanche colombe , qui se reposa sur sa tête sacrée; et cela, disent les interprètes, afin qu'on vit bien clairement que le témoignage de cette voix divine n'était point directement adressé à saint Jean, mais à Jésus-Christ .
Or, cette colombe qui se repose sur sa tête indique aussi d'une manière visible le mystère invisiblement opéré à l'instant où le Verbe éternel s'incarna dans le sein très-pur de la vierge Marie, c'est-à-dire lorsque l'Esprit-Saint se reposa dans la sainte humanité de Jésus-Christ que lui-même avait formée et que, selon saint Paul, commentant les paroles de David (Hébr., I), il combla de Fonction céleste de toutes les grâces spirituelles et divines. Or, l'Esprit-Saint rend aujourd'hui publique et manifeste «cette même onction qu'il avait déjà secrètement opérée en Jésus-Christ. Par elle, le Verbe incarné reçoit, d'une manière manifeste et éclatante, l'investiture de la rédemption du monde, et il commence ainsi sa vie publique, son action réparatrice et l'exercice des hautes fonctions de Sauveur dont il a so-lennellement obtenu du ciel les titres authentiques et le caractère divin.
Jésus-Christ donc, déjà né dans le monde selon la chair, venait aujourd'hui, d'une manière ineffable selon l'esprit, dans l'intelligence et dans le cœur des hommes, qui dès ce moment apprennent à le connaître et à l'aimer.
Ainsi, dit saint Augustin, le baptême qu'il reçoit est pour lui comme une nouvelle naissance . Car ce même Esprit-Saint, qui se reposa en lui lorsqu'il s'incarna dans le chaste sein de Marie, l'entoure d'une splendeur divine aujourd'hui qu'il se lave dans le fleuve ; il sanctifie les eaux dans lesquelles il descend, comme il rendit très-pure la Mère auguste qui le conçut. Ce même Père céleste, qui alors s'enveloppa comme dans le nuage de sa vertu, se manifeste aujourd'hui dans sa voix, et, au lieu de couvrir comme alors sa naissance par une sorte d'ombre mystérieuse, il rend dans le mystère de ce jour un témoignage public à la vérité.
Cette seconde naissance du Verbe de Dieu incarné est certainement plus glorieuse que la première. Dans la première Jésus-Christ vint au monde en silence et sans témoins; dans la seconde il est révélé au monde par la confession publique de la divinité elle-même. Alors Joseph, qui passait pour en être le véritable père, voulut se retirer et se cacher; au-jourd'hui l'Eternel, que personne ne croit être son vrai Père, se manifeste clairement. Quelle gloire pour Notre-Seigneur, s'écrie ici saint Pierre Chrysologue ! Jésus-Christ lui-même nous apprend que personne ne connaît le Fils, s'il ne connaît le Père, et que de même personne ne connaît le Père, s'il ne connaît le Fils. Avant donc que ce Fils unique fit connaître au monde son Père céleste, celui-ci, en faisant ouvrir les cieux sur la tête de son Fils, en lui envoyant l'Esprit-Saint, en l'environnant de lumière et en faisant entendre sa voix toute-puissante, le révèle au monde comme son Fils unique, vrai et consubstantiel, et cela de la manière la plus certaine, la plus sensible, la plus splendide et la plus majestueuse ; il déclare que ce Fils, descendu sur la terre, est vrai Dieu, afin que les hommes croient à sa parole lors-qu'il leur annoncera les grandeurs de Dieu le Père qui règne dans les cieux.
Toutes ces choses devaient se passer ainsi; car la divinité, qui se connaît elle seule, ne peut être connue si elle ne se manifeste et ne se rend elle-même témoignage. Or, Dieu le Père seul pouvait faire connaître son divin Fils, comme ce Fils seul pouvait nous révéler Dieu son Père . Ce n'était donc pas, comme l'observe saint Cyprien, que Jésus-Christ eût été en particulier annoncé comme Dieu et sauveur du monde aux bergers par l'ange, aux mages par l'étoile et à quelques âmes pieuses par Siméon dans le temple et dans la maison d'Elisabeth; il fallait de plus qu'il reçût directement de Dieu même un témoignage plus solen-nel, plus authentique et plus glorieux de sa divinité : ainsi, par cette voix ineffable du Dieu tout-puissant, qui, pour la première fois, retentit aux oreilles et surtout au cœur des hommes, est révélée au monde, sans énigme, sans ombre, sans figure, cette grande et nouvelle vérité de foi, savoir : que Jésus-Christ, Fils de l'homme, est le Fils vrai, consubstantiel et éternel de Dieu . Il ne faut pas croire, ajoute saint Ambroise, que cet ensemble de prodiges au milieu desquels, le ciel s'entrouvrait à la vue de tous, l'Esprit-Saint descendit sensiblement sur Jésus-Christ, le Père parla au Fils et la voix divine révéla le Verbe divin; il ne faut pas croire, dit-il, que tous ces prodiges eurent lieu seulement pour honorer ce Dieu fait homme, mais de plus pour soutenir et confirmer notre foi. Car, si la bonté divine n'avait pas eu le dessein de donner à notre foi ce soutien et cet appui dont elle avait besoin, le Père comme l'Esprit, personnes invisibles de la Sainte-Trinité, auraient pu parler en secret et descendre d'une manière invisible sur le Verbe de Dieu, sur le Fils .
Mais le mystère de ce jour, glorieux pour Jésus-Christ, à cause du témoignage céleste qu'il reçoit, est précieux pour nous à cause du grand sacrement qui est institué. Car savez-vous, dit saint Maxime, pourquoi l'homme nouveau est aujourd'hui baptisé ?
C'est pour établir, à notre avantage, un nouveau baptême comme sacrement .
Cela veut dire qu'en ce jour le Seigneur a, par son baptême, institué le nôtre ; c'est-à-dire ce sacrement ineffable qui communique à tous ceux qui le reçoivent le mérite infini du sacrifice de sa vie et de sa mort, et qui expie et efface tout péché.
Gomme dans la dernière cène, par le sacrifice eucharistique, il anticipa sur le sacrifice du Calvaire ; de même dans le Jourdain, par sou ablution dans l'eau, il anticipa sur le mystère de l'ablution de son sang et il nous, en assura le fruit.
En effet, dans la circonstance dont il s'agit, que voyons-nous arriver dans le Jourdain? D'abord Jésus-Christ lave son corps très saint dans les eaux. Or que signifie cela, dit saint Ambroise, sinon une consécration solennelle et divine que fait aujourd'hui Jésus-Christ de l'élément de l'eau pour servir de matière à notre baptême? Oui, aujourd'hui notre Sauveur sanctifie toutes les eaux, il les purifie et les élève au noble usage de former la fontaine spirituelle pour tous les peuples auxquels il donne la grâce .
Ecoutons encore le grand Augustin, qui sur le même sujet s'exprime ainsi :
Nous lisons dans les Écritures que les Juifs eurent sous l'antique loi différents baptêmes; mais aucun ne peut offrir un remède général et efficace contre les infirmités du péché. Qu'est-ce que le Seigneur a donc fait ? Il a, en recevant le baptême dans le Jourdain, consacré ses eaux, voulant en faire un remède pour tous les hommes ; et, afin que tous pussent participer au sacrement de baptême, il a voulu qu'on pût le recevoir dans tout le monde; c'est pourquoi en descendant, par un effet d'une bonté unique et singulière, dans les eaux du Jourdain, le Sauveur a donné sa bénédiction à toutes les eaux du monde. Quel prodige de sa puissance et de sa grâce ! Le corps sacré du Sauveur est baigné par les eaux et les eaux, en restent ennoblies et enrichies ! Il ne reçoit rien des eaux, mais ce sont les eaux qui reçoivent de sou corps une vertu vitale et divine ! C'est pourquoi il semble que cette eau fortunée dut rester étonnée de voir descendre en elle sa fontaine éternelle et son créateur.
Le même saint Docteur dit encore ailleurs : Admirons l'harmonie des divins mystères. Ce même Homme-Dieu qui se plonge aujourd'hui dans l'eau pure est le même que nous croyons né d'une Mère incorruptible. Quelle est donc grande la gloire de notre foi dans l'un comme dans l'autre miracle ! Marie demeura Vierge après lui avoir donné le jour; et cette eau privilégiée, après l'avoir béni, resta sanctifiée . Même on peut dire, en quelque sorte, que l'eau a reçu une plus grande abondance de faveurs que Marie ; car Marie, par sa chasteté, acquit des mérites pour elle seule, et l'eau, par la sanctification qu'elle reçoit aujourd'hui, devient capable de sanctifier tous les hommes. Marie obtint la grâce de ne jamais pécher, et l'eau acquiert la vertu de détruire tout péché ; Marie eut la virginité pour présent, et l'eau obtient aujourd'hui une prodigieuse fécondité. Marie reste pure après l'enfantement, mais elle.n'a mis au monde qu'un seul fils, et l'eau du baptême en régénère une infinité et demeure toujours vierge; Marie n'a que Jésus-Christ pour fils, et l'eau baptismale est la mère fortunée de tous les peuples. Quel admirable dessein de la bonté divine, continue le même Père ! Comme, avant de naître, nous étions, selon saint Paul, déjà pécheurs dans Adam ; ainsi aujourd'hui, par le baptême que Jésus-Christ institue, nous sommes, avant même de naître, lavés de nos péchés et justifiés en Jésus-Christ.
Car (et c'est en ceci que consiste le mystère du baptême que Notre-Seigneur reçoit eu ce jour) il a aujourd'hui même purifié les eaux qui devaient servir à purifier le monde, en sorte que ce ne fut pas tant l'eau qui lava le Christ que ce fut le Christ qui lava l'eau par un procédé de sanctification tout nouveau et prodigieux
En second lieu, que voyons-nous encore dans le Jourdain ? Nous voyons, dit saint Fulgence, se manifester au monde pour la première fois le grand, le profond et le très-haut mystère de l'auguste Trinité, et d'une manière telle que les hommes purent alors le reconnaître par les sens ; car le Père fut entendu dans la voix, le Fils fut vu dans son humanité, et l'Esprit-Saint apparut dans la colombe .
« Celui que vous voyez est mon Fils bien aimé, l'objet de mes éternelles complaisances . »
Et, s'adressant au Sauveur, il ajouta :
« Tu es mon Fils bien-aimé, j'ai mis en toi mes complaisances . »
C'était lui dire : Comme tu es la splendeur de ma gloire et l'image de ma substance, tu me plais singulièrement et en tout ; c'est toi seul que j'aime souverainement et uniquement ; en toi je me repose, je me rassasie et je me réjouis. Je mettrai mes complaisances dans les hommes et je les aimerai, mais ce n'est qu'autant qu'ils seront tes sectateurs et tes dis-ciples; et comme ils seront aimés de toi et comblés de ta grâce, ils ne formeront avec toi qu'un seul corps et ne seront qu'un seul Fils, en sorte qu'en les aimant je les aimerai en toi, et toi-même en eux.
Ce n'est pas tout : de cette même ouverture des cieux et du sein de cette gloire d'où se faisait entendre la voix mystérieuse, l'on vit l'Esprit-Saint descendre sur Jésus-Christ en forme corporelle de blanche colombe , qui se reposa sur sa tête sacrée; et cela, disent les interprètes, afin qu'on vit bien clairement que le témoignage de cette voix divine n'était point directement adressé à saint Jean, mais à Jésus-Christ .
Or, cette colombe qui se repose sur sa tête indique aussi d'une manière visible le mystère invisiblement opéré à l'instant où le Verbe éternel s'incarna dans le sein très-pur de la vierge Marie, c'est-à-dire lorsque l'Esprit-Saint se reposa dans la sainte humanité de Jésus-Christ que lui-même avait formée et que, selon saint Paul, commentant les paroles de David (Hébr., I), il combla de Fonction céleste de toutes les grâces spirituelles et divines. Or, l'Esprit-Saint rend aujourd'hui publique et manifeste «cette même onction qu'il avait déjà secrètement opérée en Jésus-Christ. Par elle, le Verbe incarné reçoit, d'une manière manifeste et éclatante, l'investiture de la rédemption du monde, et il commence ainsi sa vie publique, son action réparatrice et l'exercice des hautes fonctions de Sauveur dont il a so-lennellement obtenu du ciel les titres authentiques et le caractère divin.
Jésus-Christ donc, déjà né dans le monde selon la chair, venait aujourd'hui, d'une manière ineffable selon l'esprit, dans l'intelligence et dans le cœur des hommes, qui dès ce moment apprennent à le connaître et à l'aimer.
Ainsi, dit saint Augustin, le baptême qu'il reçoit est pour lui comme une nouvelle naissance . Car ce même Esprit-Saint, qui se reposa en lui lorsqu'il s'incarna dans le chaste sein de Marie, l'entoure d'une splendeur divine aujourd'hui qu'il se lave dans le fleuve ; il sanctifie les eaux dans lesquelles il descend, comme il rendit très-pure la Mère auguste qui le conçut. Ce même Père céleste, qui alors s'enveloppa comme dans le nuage de sa vertu, se manifeste aujourd'hui dans sa voix, et, au lieu de couvrir comme alors sa naissance par une sorte d'ombre mystérieuse, il rend dans le mystère de ce jour un témoignage public à la vérité.
Cette seconde naissance du Verbe de Dieu incarné est certainement plus glorieuse que la première. Dans la première Jésus-Christ vint au monde en silence et sans témoins; dans la seconde il est révélé au monde par la confession publique de la divinité elle-même. Alors Joseph, qui passait pour en être le véritable père, voulut se retirer et se cacher; au-jourd'hui l'Eternel, que personne ne croit être son vrai Père, se manifeste clairement. Quelle gloire pour Notre-Seigneur, s'écrie ici saint Pierre Chrysologue ! Jésus-Christ lui-même nous apprend que personne ne connaît le Fils, s'il ne connaît le Père, et que de même personne ne connaît le Père, s'il ne connaît le Fils. Avant donc que ce Fils unique fit connaître au monde son Père céleste, celui-ci, en faisant ouvrir les cieux sur la tête de son Fils, en lui envoyant l'Esprit-Saint, en l'environnant de lumière et en faisant entendre sa voix toute-puissante, le révèle au monde comme son Fils unique, vrai et consubstantiel, et cela de la manière la plus certaine, la plus sensible, la plus splendide et la plus majestueuse ; il déclare que ce Fils, descendu sur la terre, est vrai Dieu, afin que les hommes croient à sa parole lors-qu'il leur annoncera les grandeurs de Dieu le Père qui règne dans les cieux.
Toutes ces choses devaient se passer ainsi; car la divinité, qui se connaît elle seule, ne peut être connue si elle ne se manifeste et ne se rend elle-même témoignage. Or, Dieu le Père seul pouvait faire connaître son divin Fils, comme ce Fils seul pouvait nous révéler Dieu son Père . Ce n'était donc pas, comme l'observe saint Cyprien, que Jésus-Christ eût été en particulier annoncé comme Dieu et sauveur du monde aux bergers par l'ange, aux mages par l'étoile et à quelques âmes pieuses par Siméon dans le temple et dans la maison d'Elisabeth; il fallait de plus qu'il reçût directement de Dieu même un témoignage plus solen-nel, plus authentique et plus glorieux de sa divinité : ainsi, par cette voix ineffable du Dieu tout-puissant, qui, pour la première fois, retentit aux oreilles et surtout au cœur des hommes, est révélée au monde, sans énigme, sans ombre, sans figure, cette grande et nouvelle vérité de foi, savoir : que Jésus-Christ, Fils de l'homme, est le Fils vrai, consubstantiel et éternel de Dieu . Il ne faut pas croire, ajoute saint Ambroise, que cet ensemble de prodiges au milieu desquels, le ciel s'entrouvrait à la vue de tous, l'Esprit-Saint descendit sensiblement sur Jésus-Christ, le Père parla au Fils et la voix divine révéla le Verbe divin; il ne faut pas croire, dit-il, que tous ces prodiges eurent lieu seulement pour honorer ce Dieu fait homme, mais de plus pour soutenir et confirmer notre foi. Car, si la bonté divine n'avait pas eu le dessein de donner à notre foi ce soutien et cet appui dont elle avait besoin, le Père comme l'Esprit, personnes invisibles de la Sainte-Trinité, auraient pu parler en secret et descendre d'une manière invisible sur le Verbe de Dieu, sur le Fils .
Mais le mystère de ce jour, glorieux pour Jésus-Christ, à cause du témoignage céleste qu'il reçoit, est précieux pour nous à cause du grand sacrement qui est institué. Car savez-vous, dit saint Maxime, pourquoi l'homme nouveau est aujourd'hui baptisé ?
C'est pour établir, à notre avantage, un nouveau baptême comme sacrement .
Cela veut dire qu'en ce jour le Seigneur a, par son baptême, institué le nôtre ; c'est-à-dire ce sacrement ineffable qui communique à tous ceux qui le reçoivent le mérite infini du sacrifice de sa vie et de sa mort, et qui expie et efface tout péché.
Gomme dans la dernière cène, par le sacrifice eucharistique, il anticipa sur le sacrifice du Calvaire ; de même dans le Jourdain, par sou ablution dans l'eau, il anticipa sur le mystère de l'ablution de son sang et il nous, en assura le fruit.
En effet, dans la circonstance dont il s'agit, que voyons-nous arriver dans le Jourdain? D'abord Jésus-Christ lave son corps très saint dans les eaux. Or que signifie cela, dit saint Ambroise, sinon une consécration solennelle et divine que fait aujourd'hui Jésus-Christ de l'élément de l'eau pour servir de matière à notre baptême? Oui, aujourd'hui notre Sauveur sanctifie toutes les eaux, il les purifie et les élève au noble usage de former la fontaine spirituelle pour tous les peuples auxquels il donne la grâce .
Ecoutons encore le grand Augustin, qui sur le même sujet s'exprime ainsi :
Nous lisons dans les Écritures que les Juifs eurent sous l'antique loi différents baptêmes; mais aucun ne peut offrir un remède général et efficace contre les infirmités du péché. Qu'est-ce que le Seigneur a donc fait ? Il a, en recevant le baptême dans le Jourdain, consacré ses eaux, voulant en faire un remède pour tous les hommes ; et, afin que tous pussent participer au sacrement de baptême, il a voulu qu'on pût le recevoir dans tout le monde; c'est pourquoi en descendant, par un effet d'une bonté unique et singulière, dans les eaux du Jourdain, le Sauveur a donné sa bénédiction à toutes les eaux du monde. Quel prodige de sa puissance et de sa grâce ! Le corps sacré du Sauveur est baigné par les eaux et les eaux, en restent ennoblies et enrichies ! Il ne reçoit rien des eaux, mais ce sont les eaux qui reçoivent de sou corps une vertu vitale et divine ! C'est pourquoi il semble que cette eau fortunée dut rester étonnée de voir descendre en elle sa fontaine éternelle et son créateur.
Le même saint Docteur dit encore ailleurs : Admirons l'harmonie des divins mystères. Ce même Homme-Dieu qui se plonge aujourd'hui dans l'eau pure est le même que nous croyons né d'une Mère incorruptible. Quelle est donc grande la gloire de notre foi dans l'un comme dans l'autre miracle ! Marie demeura Vierge après lui avoir donné le jour; et cette eau privilégiée, après l'avoir béni, resta sanctifiée . Même on peut dire, en quelque sorte, que l'eau a reçu une plus grande abondance de faveurs que Marie ; car Marie, par sa chasteté, acquit des mérites pour elle seule, et l'eau, par la sanctification qu'elle reçoit aujourd'hui, devient capable de sanctifier tous les hommes. Marie obtint la grâce de ne jamais pécher, et l'eau acquiert la vertu de détruire tout péché ; Marie eut la virginité pour présent, et l'eau obtient aujourd'hui une prodigieuse fécondité. Marie reste pure après l'enfantement, mais elle.n'a mis au monde qu'un seul fils, et l'eau du baptême en régénère une infinité et demeure toujours vierge; Marie n'a que Jésus-Christ pour fils, et l'eau baptismale est la mère fortunée de tous les peuples. Quel admirable dessein de la bonté divine, continue le même Père ! Comme, avant de naître, nous étions, selon saint Paul, déjà pécheurs dans Adam ; ainsi aujourd'hui, par le baptême que Jésus-Christ institue, nous sommes, avant même de naître, lavés de nos péchés et justifiés en Jésus-Christ.
Car (et c'est en ceci que consiste le mystère du baptême que Notre-Seigneur reçoit eu ce jour) il a aujourd'hui même purifié les eaux qui devaient servir à purifier le monde, en sorte que ce ne fut pas tant l'eau qui lava le Christ que ce fut le Christ qui lava l'eau par un procédé de sanctification tout nouveau et prodigieux
En second lieu, que voyons-nous encore dans le Jourdain ? Nous voyons, dit saint Fulgence, se manifester au monde pour la première fois le grand, le profond et le très-haut mystère de l'auguste Trinité, et d'une manière telle que les hommes purent alors le reconnaître par les sens ; car le Père fut entendu dans la voix, le Fils fut vu dans son humanité, et l'Esprit-Saint apparut dans la colombe .
Paul Pierre- Messages : 66
Date d'inscription : 24/02/2022
- Message n°6
Re: ¨Le Baptême de Jésus-Christ
Mais pourquoi cette magnifique révélation se fait-elle dans la circonstance du baptême de Jésus-Christ? Parce que, dit saint Pierre Chrysologue, comme les trois Personnes divines concoururent à la même opération par laquelle nous avons été créés, de même on les voit aujourd'hui concourir toutes les trois l'acte de l'institution du sacrement qui nous sauve ; comme alors les trois Personnes adorables disaient entre elles :
faisons l'homme, de même elles parai-sent dire aussi :
sauvons le .
En effet, saint Maxime observe que les trois Personnes divines concoururent à cette grande action réparatrice ; car tandis que le Fils, en se laissant baptiser dans le Jourdain, accomplit le mystère, l'Esprit sanctifie le sacrement et le Père en annonce la vérité .
Saint Cyprien avait déjà dit que, par le baptême de Jésus-Christ, nous recevons
du Père la puissance,
du Fils la sagesse et
de l'Esprit-Saint l'innocence.
Le Père nous fait don de l'éternité, le Fils de sa ressemblance, le Saint-Esprit de son intégrité et de la liberté des enfants de Dieu. Par conséquent nous existons par le Père, nous vivons par le Fils, nous opérons par le Saint-Esprit, et par lui nous croissons dans la vie spirituelle de la grâce .
Observez, mes frères, que cette manifestation sensible de l'auguste Trinité se fit dans le lieu même où les eaux du Jourdain ont arrosé le corps immaculé du Sauveur. Par conséquent, disent les interprètes, la grande institution du baptême s'accomplit. Alors en effet, en consentant que les eaux coulent sur sa chair divine, le Seigneur choisit et consacra l'eau comme matière du baptême, et, par la manifestation sensible de l'auguste Trinité, il en désigna la forme .
Il est vrai qu'il ne prononça aucune parole ; mais, se laissant laver sous l'apparition de la Sainte-Trinité, il institua alors, sinon par paroles, du moins par le fait, le sacrement de baptême, puisque les institutions s'établissent aussi bien par le simple fait que par les paroles.
C'est alors que la voix de Dieu se fit vraiment entendre sur les eaux et qu'elle leur donna la vertu régénératrice, la puissance de conférer la pureté de la sanctification, les bienfaits de la grâce et la magnificence de la charité : Vox Domini super aquas; vox Domini in virtute ; vox Domini in magnificentia.
C'est donc à raison que le Prophète, comme le remarque saint Pierre Chrysologue, dit :
« La voix de Dieu sur et non point sous les eaux ; »
car Jésus-Christ ne fut point asservi à son baptême, mais il lui commanda, comme il commande encore, par un empire souverain, aux sacrements .
Afin que rien ne manquât à cette magnifique institution, non seulement la matière et la forme, mais encore l'effet et la fin y sont sensiblement indiqués. Ainsi l'Esprit-Saint y apparaît en forme de colombe, symbole de paix et d'amour ; c'est le plus candide, le plus innocent, le plus simple, le plus doux et le plus fécond de tous les oiseaux. Or, qu'est-ce que nous eût indiqué ce symbole, sinon que l'Esprit-Saint, qui descend en nous par le baptême, nous réconcilie avec Dieu, nous rend aimables et chers à ses yeux, purifie notre âme du péché, nous revêt de la candeur de l'innocence, nous donne l'esprit de simplicité et de mansuétude chrétienne, nous enrichit des trésors de la grâce, afin que nous devenions féconds en mérites et en vertus. C'est pourquoi l'Eglise, et chaque âme vraiment fidèle, est appelée, dans les Écritures, colombe uniquement chère à Dieu, charmante et belle, parce qu'elle est cachée dans les ouvertures de la pierre, qui est le Christ, ou bien dans ses plaies amoureuses, d'où sort le sang qui la lave et la purifie par le moyen des sacrements .
Pendant que la colombe se repose sur le Sauveur, le ciel s'ouvre sur sa tête, et par là nous est manifesté , dit saint Augustin, le plus grand et le plus précieux effet du baptême. Or, cet effet consiste en ce que le ciel, qui était fermé aux gentils, s'ouvre à l'homme devenu chrétien par le baptême et devient son héritage .
Saint Thomas ajoute que cette ouverture du ciel qui accompagna l'institution de ce sacrement signifie que, par le baptême , l'homme charnel et terrestre devient céleste et spirituel, et qu'il est appelé et conduit comme par la main à la possession du royaume des cieux . L'évangéliste lui-même remarque qu'au baptême du Sauveur le ciel s'ouvrit non-seulement sur lui, mais pour lui : jesu baptizatOy apertumest ei cœlum, afiii de nous faire connaître que cette grâce, qui nous ouvre le ciel, ne peut s'obtenir que par Jésus-Christ .
Enfin, mes frères, aussitôt que ce sacrement fut institué, son divin auteur- commença à l'administrer; une ancienne tradition nous apprend en effet que Jésus-Christ, dans le Jourdain même, a baptisé sa très sainte Mère, saint Jean, et peu après saint Pierre, saint Jacques, saint Jean l'évangéliste et les autres apôtres . Il est certain, d'après l'Évangile, que Jé-
sus-Christ, après avoir reçu le baptême, commença à baptiser (Joan. ni, 22) et qu'à son second voyage en Judée les apôtres baptisaient pour lui (ibid. iv, 2).
Or, comme le baptême, selon l'idée que nous en a donnée le Sauveur lui-même, est une régénération, une naissance nouvelle : Nisi guis renatus fuerit ex aqua et Spiritu sancto, .en ce jour le nouvel Adam commença donc à régénérer à la vie les hommes que le premier Adam avait engendrés à la mort. Il commença à ormer une famille, une descendance de saints, par opposition à Adam qui n'avait formé qu'une race de réprouvés. C'est là un profond et admirable secret, digne de la sagesse de Dieu, d'avoir, par le baptême, établi une sorte de génération spirituelle d'où se répand la grâce de Jésus-Christ, comme par la génération de la chair se propage le péché d'Adam; par cette génération spirituelle les mêmes hommes, qui d'abord sont nés pécheurs et fils du démon par rapport à l'âme, renaissent justes et fils de Dieu; par elle ils deviennent immortels et impassibles même dans l'ordre corporel, quoique nés mortels et passibles.
Mais la grandeur, la magnificence et l'importance de ce mystère apparaissent encore plus clairement par les sublimes figures au moyen desquelles il fut annoncé et qui ont eu en lui leur complément. Indiquons-les en peu de mots, afin que vous puissiez voir, mes frères, comment les deux Testaments se lient et se rendent un réciproque témoignage; comment l'Ancien a été, selon saint Paul, l'histoire anticipée des mystères du Nouveau, et combien enfin est grande, sublime et étonnante l'économie de la religion chrétienne.
Considérez premièrement, dit saint Jérôme, combien le mystère du baptême est ancien et vénérable, car Dieu a voulu qu'il fût figuré dès le commencement du monde . En effet, il est écrit dans la Genèse que l'Esprit du Seigneur était porté sur les eaux qui couvraient la terre à peine sortie des mains du Créateur , et cela non pas d'une manière sensible, mais, selon la profonde et délicate pensée de saint Augustin, comme la pensée et la volonté de l'ouvrier planent sur l'œuvre qui est sortie de son esprit et de ses mains . Or, quel est le mystère que l'Ecriture a voulu nous indiquer par ces paroles?
C'est celui de l'Esprit-Saint, dit saint Jérôme, qui, semblable à l'aigle dans son nid, se repose sur les eaux du baptême, les couvre et les réchauffe pour nous engendrer à la grâce et pour nous faire renaître à la vie. C'est la pensée de l'Eglise, qui dit dans la cérémonie de la bénédiction des fonts que le Saint-Esprit, au commencement du monde, se tenait sur les eaux à la manière de l'aigle sur son nid, comme pour les réchauffer et les rendre fécondes Combien est admirable et expressive cette figure magnifique ! La terre était désolée et stérile et enveloppée d'épaisses ténèbres ; et c'est seulement lorsque l'Esprit de Dieu se reposa sur les eaux de la création, que la terre commença à végéter et à produire des plantes et des animaux. De même le monde était un chaos de crimes ensevelis dans les ténèbres de toutes les erreurs ; c'est seulement après la descente de l'Esprit-Saint dans les eaux du baptême, qu'on vit germer les enfants de Dieu, les plantes et les fruits de toutes les vertus. La création entière, qui vient de l'Esprit du Seigneur et des eaux, fut donc la figure, le prélude et la prophétie de la Rédemption sortie de l'Esprit-Saint uni aux eaux du baptême. En effet, comme dans Tordre naturel les eaux primitives n'étaient bonnes à rien produire avant qu'elles ne fussent mystérieusement unies à l'Esprit-Saint, de même, dit saint Ambroise, dans l'ordre spirituel, toute eau n'efface point le péché, mais celle-là seulement dans laquelle l'Esprit-Saint descend par l'application simultanée de la forme, et celle qui contient la grâce de Jésus-Christ . C'est pourquoi saint Paul dit que le bain des eaux baptismales ne prend son efficacité, qui est de purifier les âmes, que de la grande parole de vie, de la forme dont il est accompagné
Et quelle signification ont le déluge, l'arche de Noé, le corbeau et la colombe ? Ah ! je le comprends avec saint Ambroise : je vois bien maintenant quel mystère ils expriment et quel sacrement ils figurent.
La colombe qui, dans le déluge, se hâta d'apporter la joie dans l'arche de Noé, était cette même colombe prophétique qui vient à présent dans le baptême consoler l'Eglise de Jésus-Christ . Saint Maxime dit à son tour que les homicides eaux dans lesquelles toute chair a été détruite représentent les eaux du baptême, qui absorbent et détruisent tout crime.
Le corbeau qui, sorti de l'arche, ne revient plus, me rappelle à l'esprit le péché originel qui, effacé une seule fois de l'âme par le baptême, ne retourne plus la souiller. La colombe, qui revient aussitôt, m'annonce l'innocence et la grâce, qui embellissent l'âme. Le bois, qui est là, matière dont l'arche est faite, c'est la croix de Jésus-Christ, par les seuls mérites de laquelle les âmes évitent d'être suffoquées dans les flots des abîmes éternels . Saint Pierre Chrysologue a reconnu aussi le même mystère dans la colombe : en annonçant à Noé que le déluge qui venait de détruire la terre avait cessé, elle figurait cette autre colombe qui, au baptême de Jésus-Christ, apparut sur le Jourdain pour annoncer que le naufrage éternel du monde avait cessé ; avec cette différence cependant, dit saint Ambroise, que la colombe du déluge, par le rameau d'olivier qu'elle tenait en son bec, indiquait la paix et la sécurité, tandis que la colombe du Jourdain, par la marque de la divinité qui se révèle, nous promet une éternité bien-heureuse . Comment, s'écrie saint Grégoire de Nazianzc , pourrait-on penser à cette arche qui soulève au dessus des flots les personnes renfermées dans son sein et les sauve ainsi de la suffocation universelle, sans songer aussi à ce corps très-saint du Christ, vraie arche du salut, qui, en sortant du Jourdain, y laisse enseveli le vieil homme, et, de ses divines mains, retire ses eaux et soulève vers le ciel le monde qui avait fait naufrage ?
faisons l'homme, de même elles parai-sent dire aussi :
sauvons le .
En effet, saint Maxime observe que les trois Personnes divines concoururent à cette grande action réparatrice ; car tandis que le Fils, en se laissant baptiser dans le Jourdain, accomplit le mystère, l'Esprit sanctifie le sacrement et le Père en annonce la vérité .
Saint Cyprien avait déjà dit que, par le baptême de Jésus-Christ, nous recevons
du Père la puissance,
du Fils la sagesse et
de l'Esprit-Saint l'innocence.
Le Père nous fait don de l'éternité, le Fils de sa ressemblance, le Saint-Esprit de son intégrité et de la liberté des enfants de Dieu. Par conséquent nous existons par le Père, nous vivons par le Fils, nous opérons par le Saint-Esprit, et par lui nous croissons dans la vie spirituelle de la grâce .
Observez, mes frères, que cette manifestation sensible de l'auguste Trinité se fit dans le lieu même où les eaux du Jourdain ont arrosé le corps immaculé du Sauveur. Par conséquent, disent les interprètes, la grande institution du baptême s'accomplit. Alors en effet, en consentant que les eaux coulent sur sa chair divine, le Seigneur choisit et consacra l'eau comme matière du baptême, et, par la manifestation sensible de l'auguste Trinité, il en désigna la forme .
Il est vrai qu'il ne prononça aucune parole ; mais, se laissant laver sous l'apparition de la Sainte-Trinité, il institua alors, sinon par paroles, du moins par le fait, le sacrement de baptême, puisque les institutions s'établissent aussi bien par le simple fait que par les paroles.
C'est alors que la voix de Dieu se fit vraiment entendre sur les eaux et qu'elle leur donna la vertu régénératrice, la puissance de conférer la pureté de la sanctification, les bienfaits de la grâce et la magnificence de la charité : Vox Domini super aquas; vox Domini in virtute ; vox Domini in magnificentia.
C'est donc à raison que le Prophète, comme le remarque saint Pierre Chrysologue, dit :
« La voix de Dieu sur et non point sous les eaux ; »
car Jésus-Christ ne fut point asservi à son baptême, mais il lui commanda, comme il commande encore, par un empire souverain, aux sacrements .
Afin que rien ne manquât à cette magnifique institution, non seulement la matière et la forme, mais encore l'effet et la fin y sont sensiblement indiqués. Ainsi l'Esprit-Saint y apparaît en forme de colombe, symbole de paix et d'amour ; c'est le plus candide, le plus innocent, le plus simple, le plus doux et le plus fécond de tous les oiseaux. Or, qu'est-ce que nous eût indiqué ce symbole, sinon que l'Esprit-Saint, qui descend en nous par le baptême, nous réconcilie avec Dieu, nous rend aimables et chers à ses yeux, purifie notre âme du péché, nous revêt de la candeur de l'innocence, nous donne l'esprit de simplicité et de mansuétude chrétienne, nous enrichit des trésors de la grâce, afin que nous devenions féconds en mérites et en vertus. C'est pourquoi l'Eglise, et chaque âme vraiment fidèle, est appelée, dans les Écritures, colombe uniquement chère à Dieu, charmante et belle, parce qu'elle est cachée dans les ouvertures de la pierre, qui est le Christ, ou bien dans ses plaies amoureuses, d'où sort le sang qui la lave et la purifie par le moyen des sacrements .
Pendant que la colombe se repose sur le Sauveur, le ciel s'ouvre sur sa tête, et par là nous est manifesté , dit saint Augustin, le plus grand et le plus précieux effet du baptême. Or, cet effet consiste en ce que le ciel, qui était fermé aux gentils, s'ouvre à l'homme devenu chrétien par le baptême et devient son héritage .
Saint Thomas ajoute que cette ouverture du ciel qui accompagna l'institution de ce sacrement signifie que, par le baptême , l'homme charnel et terrestre devient céleste et spirituel, et qu'il est appelé et conduit comme par la main à la possession du royaume des cieux . L'évangéliste lui-même remarque qu'au baptême du Sauveur le ciel s'ouvrit non-seulement sur lui, mais pour lui : jesu baptizatOy apertumest ei cœlum, afiii de nous faire connaître que cette grâce, qui nous ouvre le ciel, ne peut s'obtenir que par Jésus-Christ .
Enfin, mes frères, aussitôt que ce sacrement fut institué, son divin auteur- commença à l'administrer; une ancienne tradition nous apprend en effet que Jésus-Christ, dans le Jourdain même, a baptisé sa très sainte Mère, saint Jean, et peu après saint Pierre, saint Jacques, saint Jean l'évangéliste et les autres apôtres . Il est certain, d'après l'Évangile, que Jé-
sus-Christ, après avoir reçu le baptême, commença à baptiser (Joan. ni, 22) et qu'à son second voyage en Judée les apôtres baptisaient pour lui (ibid. iv, 2).
Or, comme le baptême, selon l'idée que nous en a donnée le Sauveur lui-même, est une régénération, une naissance nouvelle : Nisi guis renatus fuerit ex aqua et Spiritu sancto, .en ce jour le nouvel Adam commença donc à régénérer à la vie les hommes que le premier Adam avait engendrés à la mort. Il commença à ormer une famille, une descendance de saints, par opposition à Adam qui n'avait formé qu'une race de réprouvés. C'est là un profond et admirable secret, digne de la sagesse de Dieu, d'avoir, par le baptême, établi une sorte de génération spirituelle d'où se répand la grâce de Jésus-Christ, comme par la génération de la chair se propage le péché d'Adam; par cette génération spirituelle les mêmes hommes, qui d'abord sont nés pécheurs et fils du démon par rapport à l'âme, renaissent justes et fils de Dieu; par elle ils deviennent immortels et impassibles même dans l'ordre corporel, quoique nés mortels et passibles.
Mais la grandeur, la magnificence et l'importance de ce mystère apparaissent encore plus clairement par les sublimes figures au moyen desquelles il fut annoncé et qui ont eu en lui leur complément. Indiquons-les en peu de mots, afin que vous puissiez voir, mes frères, comment les deux Testaments se lient et se rendent un réciproque témoignage; comment l'Ancien a été, selon saint Paul, l'histoire anticipée des mystères du Nouveau, et combien enfin est grande, sublime et étonnante l'économie de la religion chrétienne.
Considérez premièrement, dit saint Jérôme, combien le mystère du baptême est ancien et vénérable, car Dieu a voulu qu'il fût figuré dès le commencement du monde . En effet, il est écrit dans la Genèse que l'Esprit du Seigneur était porté sur les eaux qui couvraient la terre à peine sortie des mains du Créateur , et cela non pas d'une manière sensible, mais, selon la profonde et délicate pensée de saint Augustin, comme la pensée et la volonté de l'ouvrier planent sur l'œuvre qui est sortie de son esprit et de ses mains . Or, quel est le mystère que l'Ecriture a voulu nous indiquer par ces paroles?
C'est celui de l'Esprit-Saint, dit saint Jérôme, qui, semblable à l'aigle dans son nid, se repose sur les eaux du baptême, les couvre et les réchauffe pour nous engendrer à la grâce et pour nous faire renaître à la vie. C'est la pensée de l'Eglise, qui dit dans la cérémonie de la bénédiction des fonts que le Saint-Esprit, au commencement du monde, se tenait sur les eaux à la manière de l'aigle sur son nid, comme pour les réchauffer et les rendre fécondes Combien est admirable et expressive cette figure magnifique ! La terre était désolée et stérile et enveloppée d'épaisses ténèbres ; et c'est seulement lorsque l'Esprit de Dieu se reposa sur les eaux de la création, que la terre commença à végéter et à produire des plantes et des animaux. De même le monde était un chaos de crimes ensevelis dans les ténèbres de toutes les erreurs ; c'est seulement après la descente de l'Esprit-Saint dans les eaux du baptême, qu'on vit germer les enfants de Dieu, les plantes et les fruits de toutes les vertus. La création entière, qui vient de l'Esprit du Seigneur et des eaux, fut donc la figure, le prélude et la prophétie de la Rédemption sortie de l'Esprit-Saint uni aux eaux du baptême. En effet, comme dans Tordre naturel les eaux primitives n'étaient bonnes à rien produire avant qu'elles ne fussent mystérieusement unies à l'Esprit-Saint, de même, dit saint Ambroise, dans l'ordre spirituel, toute eau n'efface point le péché, mais celle-là seulement dans laquelle l'Esprit-Saint descend par l'application simultanée de la forme, et celle qui contient la grâce de Jésus-Christ . C'est pourquoi saint Paul dit que le bain des eaux baptismales ne prend son efficacité, qui est de purifier les âmes, que de la grande parole de vie, de la forme dont il est accompagné
Et quelle signification ont le déluge, l'arche de Noé, le corbeau et la colombe ? Ah ! je le comprends avec saint Ambroise : je vois bien maintenant quel mystère ils expriment et quel sacrement ils figurent.
La colombe qui, dans le déluge, se hâta d'apporter la joie dans l'arche de Noé, était cette même colombe prophétique qui vient à présent dans le baptême consoler l'Eglise de Jésus-Christ . Saint Maxime dit à son tour que les homicides eaux dans lesquelles toute chair a été détruite représentent les eaux du baptême, qui absorbent et détruisent tout crime.
Le corbeau qui, sorti de l'arche, ne revient plus, me rappelle à l'esprit le péché originel qui, effacé une seule fois de l'âme par le baptême, ne retourne plus la souiller. La colombe, qui revient aussitôt, m'annonce l'innocence et la grâce, qui embellissent l'âme. Le bois, qui est là, matière dont l'arche est faite, c'est la croix de Jésus-Christ, par les seuls mérites de laquelle les âmes évitent d'être suffoquées dans les flots des abîmes éternels . Saint Pierre Chrysologue a reconnu aussi le même mystère dans la colombe : en annonçant à Noé que le déluge qui venait de détruire la terre avait cessé, elle figurait cette autre colombe qui, au baptême de Jésus-Christ, apparut sur le Jourdain pour annoncer que le naufrage éternel du monde avait cessé ; avec cette différence cependant, dit saint Ambroise, que la colombe du déluge, par le rameau d'olivier qu'elle tenait en son bec, indiquait la paix et la sécurité, tandis que la colombe du Jourdain, par la marque de la divinité qui se révèle, nous promet une éternité bien-heureuse . Comment, s'écrie saint Grégoire de Nazianzc , pourrait-on penser à cette arche qui soulève au dessus des flots les personnes renfermées dans son sein et les sauve ainsi de la suffocation universelle, sans songer aussi à ce corps très-saint du Christ, vraie arche du salut, qui, en sortant du Jourdain, y laisse enseveli le vieil homme, et, de ses divines mains, retire ses eaux et soulève vers le ciel le monde qui avait fait naufrage ?
Paul Pierre- Messages : 66
Date d'inscription : 24/02/2022
- Message n°7
Re: ¨Le Baptême de Jésus-Christ
Maintenant, mes frères, le grand Moïse, qui, sous l'ombre de la nuée miraculeuse où le Seigneur se cachait, et la verge des prodiges eu main, descend au milieu des eaux de l'Entrée et ouvre un chemin sec et sûr au peuple d'Israël pour parvenir à la terre promise, que fit-il, sinon figurer Jésus-Christ, qui, sons le nuage d'où il a parlé à Dieu son Père en s'offrant à la croix, descend aujourd'hui dans les eaux du Jourdain et par elles ouvre au peuple chrétien un chemin facile et sûr pour le ciel?
Bien plus, saint Paul lui-même affirme que, dans ce passage miraculeux, la nuée fut comme la forme, les eaux de la mer comme la matière, Moïse le ministre par lequel les Hébreux reçurent un baptême mystérieux et prophétique, dont celui institué en ce jour par le Sauveur est le complément et la réalité .
Josué, par son nom, qui est une figure très- idèle de Jésus même, a encore mieux figuré le mystère dont nous parlons. En effet, comment dans l'arche du Testament placée au milieu du Jourdain, dans les eaux, qui en partie refluèrent vers leur source et en partie se précipitèrent vers la mer, laissant à sec au peuple hébreu le lit du fleuve, comment, dis-je, ne pas reconnaître, dépeint à l'avance par une main divine, le même mystère par lequel Jésus-Christ, avec son corps très-saint, vraie arche du Testament, qui contient non point les tables de la loi, mais le législateur lui-même, descend dans ce même Jourdain et, par le moyen du baptême qu'il y institue, divise en deux le torrent des iniquités du monde, pardonne à une partie et condamne l'autre, et ouvre ainsi au peuple chrétien la voie qui conduit au pays de Chanaan, c'est-à-dire au ciel?
D'au-tant plus que le baptême du Sauveur arriva, ainsi que nous l'avons observé , non-seulement dans le même fleuve, mais au même endroit du fleuve où Josué fit le prodige qui était la prophétie de celai plus grand encore opéré par Jésus-Christ.
Mais comment et d'où vient, demande saint Pierre Chrysologue, que les eaux de ce même fleuve, qui furent comme effrayées à la présence de l'arche de la loi,, ne se retirent pas à la présence de la très-sainte Trinité ?
C'est, répond ce Père, parce que Dieu, en faisant fuir les éléments à la vue de l'arche, a voulu inspirer au peuple Israélite la crainte de sa majesté, crainte qui était le principe de l'ancienne alliance. Maintenant rien de semblable ne peut plus arriver; car l'auguste Trinité ne manifeste que la grâce et ne parle qu'au cœur . Toutefois, dit saint Ambroise, le prodige de la fuite des eaux se vit aussi à Ventrée du Sauveur dans le Jourdain, mais d'une manière plus étonnante; car, au temps de Josué, ce furent les eaux matérielles qui se retirèrent ; à pré-sent ce sont des eaux bien plus hideuses et plus horribles qui fuient à la présence du Sauveur : ce sont les eaux du péché. Celles du Jourdain, à la voix de Josué, remontèrent vers leur source ; maintenant les hommes, par le ministère du Dieu rédempteur, retournent à leur primitive innocence et à la grâce originelle dans laquelle Dieu les avait créés . Saint Paul nous apprend, en effet, que par le baptême nous nous revêtons de l'homme nouveau, de l'homme primitif que Dieu créa dans la sainteté et dans la justice de la vérité .
Enfin le mystère du baptême a été prédit et figuré dans l'histoire de Naaman, roi de la Syrie. Quand le prophète Elisée promit à ce gentil orgueilleux que s'il se lavait par sept fois dans le Jourdain, il serait guéri de l'horrible lèpre dont il était couvert , ce prince s'offensa d'abord de la futilité d'un tel remède. Est-ce que, dit-il, les fleuves de la Syrie ne sont pas également bons pour me laver?
Insensé, lui répond saint Ambroise, l'eau du Jourdain n'a rien de semblable à l'eau des autres fleuves. C'est une eau mystérieuse et prophétique; car elle sera un jour sanctifiée par la présence du Dieu fait homme. Tu seras guéri non point par une qualité particulière des eaux du Jourdain, mais par la vertu et par les mérites du bain divin qui te sera appliqué par anticipation. Heureusement pour Naaman qu'il consentit enfin à aller se laver dans le Jourdain ; car il fut à l'instant guéri de la lèpre du corps, et il comprit et fit dès lors comprendre que toute eau n'est pas bonne pour guérir de la lèpre de l'âme, mais la seule eau du Jourdain, c'est-à-dire du baptême institué dans ce fleuve, et que ce n'est point l'eau qui produit le prodige d'effacer le péché, mais bien la grâce qui s'y trouve unie .
Mais qui put décider cet homme si altier à aller se laver dans le Jourdain ? Ce fut la plus jeune de ses esclaves, qui était attachée au service de la reine . Cette femme sage, dit saint Ambroise, était la figure de l'Eglise, laquelle, quoique d'abord sujette et esclave des rois idolâtres dans l'ordre temporel, a néanmoins, par sa prédication et par ses conseils, persuadé à ses maîtres orgueilleux et à leurs peuples vains et superstitieux d'écouter cette parole prophétique de Jésus-Christ :
« Celui qui croira et sera baptisé, sera sauvé » .
Heureux mille fois nous-mêmes, mes frères, qui, par les soins de cette tendre mère l'Eglise, avons reçu ce bain salutaire! il a détruit en nous la lèpre du péché et nous a régénérés à la santé véritable, à la grâce et à la vie de Jésus-Christ. Il ne nous reste plus que deux réflexions à faire sur cela dans la seconde partie.
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Bien plus, saint Paul lui-même affirme que, dans ce passage miraculeux, la nuée fut comme la forme, les eaux de la mer comme la matière, Moïse le ministre par lequel les Hébreux reçurent un baptême mystérieux et prophétique, dont celui institué en ce jour par le Sauveur est le complément et la réalité .
Josué, par son nom, qui est une figure très- idèle de Jésus même, a encore mieux figuré le mystère dont nous parlons. En effet, comment dans l'arche du Testament placée au milieu du Jourdain, dans les eaux, qui en partie refluèrent vers leur source et en partie se précipitèrent vers la mer, laissant à sec au peuple hébreu le lit du fleuve, comment, dis-je, ne pas reconnaître, dépeint à l'avance par une main divine, le même mystère par lequel Jésus-Christ, avec son corps très-saint, vraie arche du Testament, qui contient non point les tables de la loi, mais le législateur lui-même, descend dans ce même Jourdain et, par le moyen du baptême qu'il y institue, divise en deux le torrent des iniquités du monde, pardonne à une partie et condamne l'autre, et ouvre ainsi au peuple chrétien la voie qui conduit au pays de Chanaan, c'est-à-dire au ciel?
D'au-tant plus que le baptême du Sauveur arriva, ainsi que nous l'avons observé , non-seulement dans le même fleuve, mais au même endroit du fleuve où Josué fit le prodige qui était la prophétie de celai plus grand encore opéré par Jésus-Christ.
Mais comment et d'où vient, demande saint Pierre Chrysologue, que les eaux de ce même fleuve, qui furent comme effrayées à la présence de l'arche de la loi,, ne se retirent pas à la présence de la très-sainte Trinité ?
C'est, répond ce Père, parce que Dieu, en faisant fuir les éléments à la vue de l'arche, a voulu inspirer au peuple Israélite la crainte de sa majesté, crainte qui était le principe de l'ancienne alliance. Maintenant rien de semblable ne peut plus arriver; car l'auguste Trinité ne manifeste que la grâce et ne parle qu'au cœur . Toutefois, dit saint Ambroise, le prodige de la fuite des eaux se vit aussi à Ventrée du Sauveur dans le Jourdain, mais d'une manière plus étonnante; car, au temps de Josué, ce furent les eaux matérielles qui se retirèrent ; à pré-sent ce sont des eaux bien plus hideuses et plus horribles qui fuient à la présence du Sauveur : ce sont les eaux du péché. Celles du Jourdain, à la voix de Josué, remontèrent vers leur source ; maintenant les hommes, par le ministère du Dieu rédempteur, retournent à leur primitive innocence et à la grâce originelle dans laquelle Dieu les avait créés . Saint Paul nous apprend, en effet, que par le baptême nous nous revêtons de l'homme nouveau, de l'homme primitif que Dieu créa dans la sainteté et dans la justice de la vérité .
Enfin le mystère du baptême a été prédit et figuré dans l'histoire de Naaman, roi de la Syrie. Quand le prophète Elisée promit à ce gentil orgueilleux que s'il se lavait par sept fois dans le Jourdain, il serait guéri de l'horrible lèpre dont il était couvert , ce prince s'offensa d'abord de la futilité d'un tel remède. Est-ce que, dit-il, les fleuves de la Syrie ne sont pas également bons pour me laver?
Insensé, lui répond saint Ambroise, l'eau du Jourdain n'a rien de semblable à l'eau des autres fleuves. C'est une eau mystérieuse et prophétique; car elle sera un jour sanctifiée par la présence du Dieu fait homme. Tu seras guéri non point par une qualité particulière des eaux du Jourdain, mais par la vertu et par les mérites du bain divin qui te sera appliqué par anticipation. Heureusement pour Naaman qu'il consentit enfin à aller se laver dans le Jourdain ; car il fut à l'instant guéri de la lèpre du corps, et il comprit et fit dès lors comprendre que toute eau n'est pas bonne pour guérir de la lèpre de l'âme, mais la seule eau du Jourdain, c'est-à-dire du baptême institué dans ce fleuve, et que ce n'est point l'eau qui produit le prodige d'effacer le péché, mais bien la grâce qui s'y trouve unie .
Mais qui put décider cet homme si altier à aller se laver dans le Jourdain ? Ce fut la plus jeune de ses esclaves, qui était attachée au service de la reine . Cette femme sage, dit saint Ambroise, était la figure de l'Eglise, laquelle, quoique d'abord sujette et esclave des rois idolâtres dans l'ordre temporel, a néanmoins, par sa prédication et par ses conseils, persuadé à ses maîtres orgueilleux et à leurs peuples vains et superstitieux d'écouter cette parole prophétique de Jésus-Christ :
« Celui qui croira et sera baptisé, sera sauvé » .
Heureux mille fois nous-mêmes, mes frères, qui, par les soins de cette tendre mère l'Eglise, avons reçu ce bain salutaire! il a détruit en nous la lèpre du péché et nous a régénérés à la santé véritable, à la grâce et à la vie de Jésus-Christ. Il ne nous reste plus que deux réflexions à faire sur cela dans la seconde partie.
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